Le canton de Genève et SIG (Services industriels de Genève) ont effectué un forage exploratoire qui est descendu jusqu’à 1 455 mètres de profondeur, à Lully, sur la commune de Bernex. Ce forage, l’un des plus profonds jamais creusés à Genève, est réalisé dans le cadre du programme GEothermie 2020, qui a pour but de contribuer à atteindre les objectifs fixés par le canton de Genève en matière d’énergie thermique. À l’horizon 2035, la géothermie pourrait ainsi couvrir 20 % des besoins de chaleur du canton.
Les Services industriels de Genève (SIG) ont en effet réalisé un forage exploratoire de moyenne profondeur à Lully, sur la commune de Bernex. Ce projet pilote est descendu à 1455 m sous terre, et il est l’un des plus profonds jamais réalisés à Genève. Il a pour but de vérifier les prévisions établies à partir de la surface et de contrôler la présence d’eau et son débit. À cette profondeur, la température de l’eau pourrait atteindre les 47 °C.
«Le sous-sol genevois est gorgé d’eau, mais répartie de manière hétérogène», précise Nathalie Andenmatten, cheffe de projet GEothermie 2020 du canton de Genève. C’est pourquoi depuis 5 ans, le canton de Genève et SIG réalisent une cartographie précise du sous-sol du canton dans le cadre du programme GEothermie 2020. «Cette cartographie a permis d’identifier des structures géologiques en profondeur, des failles naturelles dans lesquelles on présume que l’eau circule. Mais pour vérifier ces prévisions, il fallait forer», ajoute Nathalie Andenmatten.
Le premier forage exploratoire a été réalisé avec succès à Satigny, il y a 2 ans. Il est descendu à 744 m de profondeur et a permis de trouver de l’eau à une température moyenne de 33°C, qui remonte naturellement à la surface. Cela permettrait de couvrir les besoins en chaleur de 2000 à 3000 ménages. «Avec ce 2e forage exploratoire, nous sommes descendus plus profondément sous terre. Nous avons mis à profit l’expérience acquise lors du premier forage à Satigny. La géothermie est une ressource locale et propre, c’est ainsi que nous parviendrons à concrétiser la transition énergétique», explique Christian Brunier, directeur général de SIG.
Le site de Lully a été choisi en raison de la nature des couches géologiques et des failles qui sont différentes de celles de Satigny. Ce forage, GEo-02, a été planifié sur 8 mois et a coûté 2,5 millions de francs suisses (soit 2,3 M€). Et comme pour tous ses chantiers, SIG a pris toutes les mesures pour garantir la sécurité.
Par exemple, un réseau de surveillance permanente a été mis en place en collaboration avec le Service sismologique suisse et l’Université de Genève, bien qu’aucune sismicité n’ait été ressentie sur le forage de Satigny. Les données sont d’ailleurs disponibles en direct sur Internet. Des mesures ont également été prises pour réduire les nuisances pour les riverains.
«Initialement, la foration de la section aquifère était prévue à la boue bentonitique, mais, de par notre expérience en forage d’eau, nous avons proposé de réaliser cette section à l’eau claire, et ainsi minimiser le risque de colmatage et de perte d’information, contrairement au forage à la boue», commente Alexandre Duzan de chez Sondalp Hydroforage.
«La complexité du chantier a nécessité la mise en œuvre des meilleurs savoirfaire dans le domaine des forages d’eau en raison des contraintes fortes pour la gestion des eaux en surface (artésianisme jaillissant, débit important, contexte foncier à maîtriser) ; et de la présence potentielle de gaz inflammables lors de la foration (installation d’un BOP – Blow Out Preventer – et d’une torchère ad hoc)», poursuit ce dernier.
Le forage de Lully est le 2e forage exploratoire sur les 4 forages prévus de moyenne profondeur par le programme. Ce programme est piloté par Genève et mis en œuvre par SIG. Il avance progressivement et suit une approche prudente. Les connaissances de la géologie à moyenne profondeur (jusqu’à 2000 m) du bassin genevois vont ainsi considérablement s'améliorer. «L’objectif est d’exploiter la géothermie pour le chauffage tout en respectant le cycle de l’eau et l’environnement à l’échelle régionale», souligne Antonio Hodgers, conseiller d’État chargé du département du territoire (DT). «La géothermie est un atout majeur de la transition écologique, car elle vise à couvrir 20 % des besoins de chaleur du canton de Genève, tout en réduisant fortement les émissions de CO2», poursuit ce dernier.
Actuellement, l’approvisionnement énergétique de Genève pour le chauffage repose principalement sur l’importation d’énergies fossiles, le mazout et le gaz. Le canton s’est fixé pour objectif de baisser la consommation thermique fossile de 39 % par habitant d’ici 2023. Cet objectif sera notamment atteint grâce aux contributions de la géothermie, du réseau hygrothermique GeniLac et de la valorisation des rejets thermiques.
La commune de Bernex propose également à ses habitants des mesures incitatives pour réduire la dépendance aux énergies fossiles, notamment avec le programme «Sortir du mazout». Des mesures qui s’ajoutent au programme des subventions cantonales. «La géothermie est une des options prometteuses pour se désengager des énergies fossiles. C’est un excellent complément aux autres systèmes de chauffage basés sur les énergies renouvelables qui bénéficient de nos mesures incitatives», affirme Cyril Huguenin, maire de Bernex.
GEOTHERMIES: UN PROGRAMME DE DÉVELOPPEMENT DURABLE ET MAÎTRISÉ
Initié en 2014, le programme GEothermies, prévoit de réaliser 4 forages exploratoires de moyenne profondeur dans 4 contextes géologiques différents pour avoir une bonne représentativité du sous-sol genevois. On estime que le sous-sol est gorgé d’eau sous pression, mais que cette eau est répartie de manière hétérogène. Le but de ces opérations est d’identifier les contextes géologiques les plus favorables pour l'exploitation de la géothermie.
La géothermie permettra à l’avenir de diminuer fortement les émissions de CO2, en réduisant ainsi la dépendance aux énergies fossiles remplacée par de l’énergie propre et locale.
Aude Moutarlier