LYON-TURIN FERROVIAIRE UN PROJET (RE)DEVENU CHANTIERS - <p>Forage et injection en jet-grouting par Vinci et en « intérieur » sur les hauteurs d’Avrieux à fin février 2022.</p>
05/07/2022

LYON-TURIN FERROVIAIRE UN PROJET (RE)DEVENU CHANTIERS


Les équipes s’activent sur le SMP4, notamment pour consolider la voûte.
Fixation des cintres qui assurent la tenue de la galerie SMP4.

L’attribution de plus de 3 milliards d’euros de travaux à la mi-2021 a donné un nouvel allant à l’un des plus grands projets européens de construction en souterrain.

Le Lyon-Turin est l’un des plus grands chantiers ferroviaires européens actuels. Fruit d’une collaboration franco-italienne, le projet, dont la réalisation a été confiée à la société mixte du Tunnel Euralpin Lyon-Turin (TELT SAS, maître d’ouvrage), est aussi largement soutenu financièrement par l’Union européenne.

Et pour cause, puisque la liaison transalpine est le maillon manquant du corridor méditerranéen. L’axe du réseau ferroviaire européen (RTE-T) qui relie la péninsule ibérique à l’Europe de l’Est. Il permettra de traverser les Alpes en faisant circuler les trains à une vitesse de plaine (220 km/h pour les voyageurs et 120 km/h pour le fret). D’après TELT, il doit au passage, retirer 1 million de camions des autoroutes alpines, avec d’importants avantages économiques et environnementaux.

Cet ouvrage fait partie du système de corridors ferroviaires modernes et performants voulus par l'UE pour réduire les transports routiers et les émissions de CO2. À ce titre, il s’inscrit dans les objectifs du programme du Pacte vert (Green Deal).

 

UN TUNNEL BITUBE DE 57,5 KILOMÈTRES

 

Le tunnel de base entre la France et l’Italie est formé de 2 tubes de manière à séparer le flux des trains dans les deux sens, et assurer la sécurité, pour un total de 115 km de tunnels. Mais, plus qu’un simple tunnel, le Lyon-Turin un système complexe. Outre les deux tunnels parallèles, il est composé de 4 descenderies, futurs ouvrages utiles à la maintenance et à la ventilation ainsi que de 204 rameaux assurant, tous les 330m, la communication entre les 2 tubes; bref, 162 km de galeries sont prévus! Sans parler des nombreux ouvrages de gabarits variables qui devront être réalisés en souterrain (PC sécurité, puits de ventilation chambres de pompage, niches pour le percement des sondages non destructifs à l’avancement).

Début mars 2022, 30 km de galeries étaient forés, certains de longue date, d’autres moins. Et le projet a repris une vigueur nouvelle avec l’attribution, le 7 juillet 2021, du lot 1 (groupement conduit par Eiffage Génie Civil), lot 2 (groupement Vinci Construction Grands Projets) et lot 3 (groupement Implenia Suisse). Ensemble, ces lots représentent une valeur de travaux supérieure à 3Mrds €, pour le creusement de 80 % du tunnel de base.

 

700 OUVRIERS MOBILISÉS SUR LE TRACÉ

 

« Le Lyon-Turin n’est pas seulement un projet en phase d’études de réalisation, mais un ouvrage en cours de construction. Les chantiers sont nombreux et les équipes s’activent sur de nombreux fronts », insiste un porte-parole de TELT. Sur l’ensemble du tracé, les travaux mobilisent actuellement près de 700 ouvriers (soit un quart de l’effectif attendu en 2025). La moitié de ces 700 personnes est à l’œuvre sur le puits d’Avrieux, près de Modane. Là, il s’agit de creuser quatre cheminées (500 m de profondeur) dédiées à la ventilation du tunnel de base. Pour ce faire, un premier forage de 40 cm de diamètre sera réalisé depuis la surface sur toute la longueur de manière à y introduire une tige support. Cette tige permettra de fixer la Raise-Boring Machine (double fraise rotative), qui pourra entreprendre le creusement en vraie grandeur, du bas vers le haut cette fois. Mais, en ce tout début mars, sur la plateforme d’Avrieux, l’heure est au renforcement des sols et au confortement des ouvrages par la réalisation, en jet-grouting, d’un massif de « pieux » enserrant chacune des têtes de cheminées.

 

SMP4 : FIN DES CREUSEMENTS PRÉVUS EN AVRIL 2022

 

Les travaux du groupement d’entreprises SMP4 se terminent. Les terrains traversés se caractérisent par un comportement fortement poussant (convergence). Ces excavations traversent en effet les formations du « Houiller productif », déjà mis en évidence lors de l’excavation de la descenderie de Saint-Martinla-Porte (SMP1). Elles sont de nouveau retrouvées lors du creusement à l’axe du tube sud du tunnel de base du Lyon-Turin (SMP4) à la verticale de la commune de Saint-Martin-la-Porte. Dans ces zones complexes, après avoir effectué des reconnaissances complémentaires et des études fines, des profils de soutènement et des conditions d’excavations adaptées ont été définis ou confirmés puis mis en œuvre. En parallèle de ces excavations, le modèle numérique a été vérifié avec des rétro-analyses régulières qui ont permis d’ajuster au mieux ces soutènements et ces conditions d’excavations au fur et à mesure de l’avancement, des convergences effectivement mesurées et de la rencontre d’événements particuliers (failles, zones broyées).

 

1,4 KILOMÈTRE EXCAVÉ EN PRÈS DE 5 ANS

 

Ici, pas question de bénéficier des cadences élevées du tunnelier, mais de progresser à pas comptés, afin d’assurer la sécurité des équipes et la continuité de la progression. Les cadences d’excavation en mode traditionnel du 1,4 km concerné sont très lentes. Le début des excavations dans ce secteur remonte à 2017 et la fin en est prévue dans le courant de 2022. Ces derniers travaux dans le Houiller productif sont réalisés à partir de 2 fronts d’attaque : un front en direction de Turin (attaque) un front en direction de Lyon (contre-attaque). Ces 2 fronts devraient se rejoindre au printemps 2022.

En comparaison, le tunnelier Federica a excavé 9 km de tunnel principal en moins de 3 ans, de fin 2016 à septembre 2019, dans des unités géologiques.

Le soutènement mis en œuvre sur ces excavations est dit « souple » pour absorber les convergences. Il est composé notamment de béton projeté fibré, d’une très grande densité de boulons autoforants, de cintres TH (déformable) et de boulons fibres de verre dans le front. Au fur et à mesure de l’avancement, les zones les plus sensibles seront doublées par un anneau de blocage provisoire en béton (> 50 cm). Ces travaux de revêtement devraient être achevés dans le courant de l’été 2022.

 

Philippe Morelli