L’eau dans le sol constitue l’une des principales causes de sinistralité en géotechnique et une source de difficultés
importantes lors de la réalisation de travaux. Il faut dire que l’hydrogéologie est une discipline complexe qui n’est pas
toujours correctement appréhendée dans les études géotechniques. Nous présentons ici une approche simplifiée des principaux contextes et enjeux hydrogéologiques qui peuvent se présenter aux géotechniciens.
DIFFÉRENTES ORIGINES DE L’EAU DANS LE SOL
Il y a souvent confusion entre « eau dans le sol » et « nappe », avec une mauvaise estimation
des niveaux et des débits par méconnaissance du contexte et inadaptation des investigations.
Afin de bien cerner le contexte général, il convient de démarrer par des études bibliographiques sur la
géologie locale et les aquifères présents sur le site.
À ce stade, l’objectif est de savoir si nous sommes en présence d’une ou de plusieurs nappes et de quelle nature elles sont afin de définir des investigations pertinentes et adaptées.
On considère généralement, et à tort, que l’eau détectée dans un sondage est une nappe, comme on considère souvent qu’une nappe est alluviale. Les études se concentrent alors sur des suivis piézométriques et, au mieux, elles comportent des essais d’eau simples (de type Lefranc ou Porchet). Cette démarche est correcte mais reste insuffisante, car elle ne permet pas d’appréhender la totalité des systèmes hydrogéologiques. En effet, il existe plusieurs types de nappes qui peuvent coexister.
NAPPES PERCHÉES, POCHES D’EAU
Les nappes de type « perchée » peuvent régner au sein des remblais ou des sols de surface. Elles se forment à la faveur d’écoulements de surface (pluviométrie, ruissellements…) dans des terrains
superficiels perméables reposant sur un niveau inférieur plus imperméable. Elles ont un caractère aléatoire et ne sont pas permanentes.
Il arrive qu’aucune présence d’eau ne soit observée dans les sondages ou piézomètres lors des investigations.
Ceci n’exclut pas que des circulations de surface puissent se produire ultérieurement.
Les risques générés par ces écoulements sont liés à la non-prise en compte des circulations
d’eau dans les études, par exemple :
NAPPES ALLUVIALES
La présence d’une nappe alluviale est généralement signalée dans la bibliographie.
Les études spécifiques doivent permettre de déterminer les niveaux d’eau caractéristiques (NPHE, EB, EH, EE…) ainsi que le débit qui peut être important.
La pose de piézomètres sélectifs permet un bon suivi des variations du niveau d’eau. La mise en place d’ouvrages de plus gros diamètre ou de puits permet la réalisation des essais d’eau nécessaires
(essais de pompage). Les risques sont généralement liés à une mauvaise estimation du débit qui
peut être sous-estimé dans des essais de perméabilité ponctuels réalisés dans des piézomètres de faible diamètre. S’ensuit la mise en place d’un dispositif de rabattement insuffisant pour effectuer
les terrassements ce qui génère des retards de chantier. De plus, un débit sous-estimé peut conduire à une difficulté de rejet des volumes d’eau plus importants qui sont ainsi pompés.
En phase définitive, une mauvaise estimation des niveaux d’eau caractéristiques peut conduire
à l’inondation des parties enterrées si l’eau monte au-dessus de la cote de cuvelage, ou à une pression plus forte sur les murs de soubassement, dallages, radiers… qui n’ont pas été dimensionnés
pour une telle hauteur d’eau.
NAPPES DE VERSANT, NAPPE DE FISSURES, KARSTIQUE
La présence de reliefs engendre généralement des écoulements de surface liés à la pluviométrie.
Toutefois, au-delà de ces écoulements, un versant peut être l’objet d’écoulements de sub-surface dont la nature et l’origine sont assez variées :
La particularité de ces sites est que les investigations peuvent ne pas détecter de présence d’eau. Le site est généralement hors impact de la nappe alluviale et les piézomètres peuvent rester secs sur une longue période.
Pourtant, l’absence d’eau dans les forages ou les piézomètres ne permet pas de conclure
à l’absence d’eau ou de nappes. On peut également observer des relevés complètement différents
dans des piézomètres assez proches.
Les nappes présentes dans des milieux fracturés ou karstiques se manifestent par des arrivées d’eau localisées (type sources) notamment en cas de terrassements en déblai ou de forages dans le
versant. Les arrivées d’eau peuvent se produire en phase travaux ou, encore pire, après
réception des ouvrages à l’occasion d’une recharge du système hydrogéologique.
Les débits peuvent être importants et avoir des conséquences lourdes sur le déroulement du chantier
ou la stabilité des ouvrages (soulèvement de dallage, inondation des parties enterrées…).
NAPPES ARTÉSIENNES, CAPTIVES
Ce type de nappe se manifeste dans le cas où un horizon perméable (aquifère) est compris entre deux couches imperméables. Les nappes captives sont généralement sous pression.
L’identification d’une telle nappe se fait à partir d’études bibliographiques et d’analyses géologiques du site. Des piézomètres sélectifs dans l’aquifère visé sont nécessaires. Cette opération est assez technique et peut nécessiter un télescopage des tubages pour isoler et protéger la nappe captive des écoulements de surface.
Les risques sont liés au percement d’un aquifère en charge non identifié :
Michel Khatib
Directeur technique et Innovation Ginger CEBTP