CONTEXTE DE CETTE EXPÉRIMENTATION
Le réseau routier départemental de Vendée s’étend sur 4 800 km, dont 415 km dans les marais breton et poitevin, soit 8,6 % du réseau. Dans ces zones, les chaussées et pistes cyclables
présentent des désordres récurrents, suite aux déformations causées par le retrait-gonflement des argiles, qui peuvent dépasser parfois plusieurs dizaines de centimètres.
Le conseil départemental de Vendée, gestionnaire de la voirie, doit effectuer régulièrement des reprises de la chaussée suite aux désordres apparaissant à la fin de l’été. Ces travaux ne traitant pas la cause des dégradations, leur effet est très limité dans le temps. En outre, le dérèglement climatique, et notamment les épisodes de sécheresse, particulièrement marqués dernièrement, accentuent
ces déformations et les rendent plus fréquentes.
Pour rechercher des solutions plus efficaces et pérennes, le conseil départemental
de Vendée et le Cerema agence d’Angers ont signé un partenariat pour rechercher et évaluer des solutions techniques innovantes pour la construction et l’entretien de ces voiries problématiques.

« Le dérèglement climatique et notamment les épisodes de sécheresse, particulièrement marqués dernièrement, accentuent ces déformations et les rendent plus fréquentes »

Ces actions ont vocation à enrichir les travaux méthodologiques produits par le Cerema, pour les consolider et assurer la capitalisation nécessaire à une diffusion au sein de la communauté scientifique et vers l’ensemble des maîtres d’ouvrages.
Ces actions se sont déroulées en 3 phases qui ont permis une approche
au cas par cas, notamment pour le site d’étude de la RD746 à Saint-Michel-enl’Herm, sujet à d’importantes dégradations de chaussée :

• phase 1 : diagnostic des structures et des sols en place, comparaison avec
  des contextes semblables dans d’autres territoires ;
• phase 2 : définition de solutions de travaux et choix de 3 sites tests avec le département de la Vendée ;
• phase 3 : réalisation et suivi des chantiers expérimentaux.

La section de route étudiée (environ 200 m) a fait l’objet d’investigations géotechniques sur la base d’un programme de reconnaissance par sondages tarière et pénétromètre dynamique, afin d’effectuer les prélèvements et analyses nécessaires à la caractérisation des sols en place. Ces sondages ont permis d’identifier des argiles molles, très plastiques et organiques, avec des teneurs en eau élevées aux alentours de 60 %, présentant une forte sensibilité au retrait-gonflement.
Remarque : les données géotechniques sont primordiales dans ce type d’étude et permettent à l’entreprise en charge des travaux de cibler avec précision les zones à traiter et d’adapter sa technique ou son mode opératoire, si besoin.
Sur la base du cahier des charges établi conjointement par le département de la Vendée et le Cerema, ce procédé a été mis en oeuvre par la société Keller sur la section de route de la RD746.

LE PROCÉDÉ ET LA PLANCHE D’ESSAIS
Cette solution se compose d’un polymère naturel comportant des cations, tels le potassium et l’ammonium qui ont la particularité de se fixer sur la particule d’argile et de limiter ainsi
le phénomène de retrait gonflement. Une batterie de bio-essais conforme au protocole HP14 sur les organismes terrestres et aquatiques a pu démontrer la non-toxicité du produit.

La planche d’essais a consisté à tester 2 configurations de traitement sur 40 m de route séparées par une zone tampon sans injection de 10 m. Les injections sont disposées dans un cas suivant 2 lignes de 2,5 m de profondeur sur les 2 accotements uniquement et dans l’autre cas sur la pleine largeur de la chaussée suivant une maille régulière.

L’INSTRUMENTATION ET SON SUIVI
Pour pouvoir étudier son efficacité, une instrumentation du site a été installée par le Cerema. Elle permet le suivi des déformations altimétriques de la chaussée sur différents profils et la mesure du
pourcentage d’humidité dans le sol.
Pour cela, il a été défini un point de référence, fixe et stable, sur un ouvrage d’art à proximité, et des points topographiques ont été répartis sur toute la longueur
de la zone d’injection, ainsi que sur une zone vierge non traitée, de sorte à comparer les évolutions entre les deux planches d’essais. Un relevé topographique est réalisé à l’aide d’un nivellement
laser, généralement à la fin de l’été et au milieu du printemps, au moment
où le différentiel de retrait-gonflement est le plus élevé.
En parallèle, des sondes équipées de capteurs d’humidité ont été positionnées
dans les argiles au droit de ces deux zones. Les sondes, alimentées par panneaux solaires, sont autonomes et enregistrent des mesures quotidiennes, ces données étant envoyées automatiquement
sur un serveur pour y être analysées dans un second temps.
Pour ce projet, aucun essais de gonflement n'a été effectué en laboratoire sur l'argile naturelle et traitée par
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RemediaClay mais il faut savoir que l'efficacité du traitement peut facilement être mise en évidence en laboratoire avec ce type d'essais. Les essais de gonflement comparatifs peuvent être envisagés en amont d'un projet sur des échantillons de sol prélevés à partir de sondages pour valider l'efficacité du procédé mais également en phase travaux pour la réception des travaux à partir d'échantillons prélevés entre points d'injection.

LES RÉSULTATS DE LA PLANCHE D’ESSAIS
L’exploitation des données topographiques a permis d’observer des
déformations de plusieurs centimètres en moyennes dans la zone non injectée et plus particulièrement en bord de chaussée, qui est la partie la plus proche du fossé récupérant les eaux. La zone injectée en RemediaClay ne s’est quant à elle déformée que de quelques millimètres (correspondant à la précision de la mesure) sur la même période.
L’interprétation des capteurs d’humidité montre une variation du pourcentage d’eau dans le sol jusqu’à 60 %, entre le mois de juillet et le mois de mars, dans la zone non traitée. La section injectée, présente une variation du pourcentage d’eau sur la même période de l’ordre de 20 %, limitant ainsi le phénomène de retrait-gonflement de l’argile.
Les suivis sont toujours en cours, mais à ce stade nous remarquons une action positive du traitement par l’injection du produit de la solution, qui a limité de manière significative le retrait-gonflement
de l’argile sur une période d’observation de 3 ans. Il reste encore à juger de son efficacité à plus long terme dans un contexte particulier de routes en zone de marais.
Comparaison des déformations différentielles entre le centre de la chaussée
et les accotements entre la zone témoin non traitée et les zones traitées entre 2021 et 2024.

Xavier Charrier
Chargé d’études en géotechnique
Cerema d’Angers
Serge Lambert
Directeur technique
Keller Fondations spéciales