Afin de décongestionner et sécuriser les centres-villes de Jargeau et Saint-Denis-de-l’Hôtel, une déviation de
14,7 kilomètres, à deux voies de circulation, est en cours de construction et ouvrira en 2025. Ces travaux donnent lieu à
la création d’un nouveau pont en amont de l’agglomération d’Orléans qui permettra de franchir la Loire. Construit dans
un environnement géologique délicat, il nécessite 54 pieux de fondations de diamètre 1 400 mm qui sont réalisés à l’abri
d’un tubage métallique sur les horizons les plus fracturés, et par l’utilisation d’une gaine en polyamide dans les horizons
moyennement fracturés.
Le maître d’ouvrage, le conseil départemental du Loiret, a attribué le marché de ce franchissement sur une longueur de 4 180 m à un groupement dont la conception est confiée à Strates, SCE, Secoa et Fondasol ; la réalisation est assurée par Baudin Châteauneuf (mandataire), Charier et Spie batignolles
fondations.
Les travaux s’articulent donc autour de cet ouvrage d’art d’une longueur de 570 m. Ce dernier est composé d’un tablier mixte en caisson avec des travées principales de 115 m, reposant sur 7 piles construites dans le lit mineur de la Loire et fondées chacune sur 6 pieux de diamètre 1 400 mm ; d’un ouvrage de décharge situé dans le lit endigué de la Loire. Cet ouvrage, d’une longueur de 75 m, est constitué de poutres en béton précontraint, reposant sur 4 piles fondées sur des pieux de diamètre 1
400 mm ; et d’importants mouvements de terre, permettant de connecter les ouvrages, en particulier le franchissement de la levée de la Loire, de rétablir la continuité paysagère et d’orienter les eaux du fleuve en cas de crue.
CONTEXTE HYDROGÉOLOGIQUE ET RISQUE GÉOTECHNIQUE
Les pieux des ouvrages sont situés dans les lits majeurs et mineurs de la Loire.
Les formations géologiques traversées sont les alluvions de la Loire sur une épaisseur de 2 à 10 m, les calcaires de Pithiviers d’une épaisseur de 15 à 20 m et dont la particularité est d’être
vacuolaires, la molasse du Gâtinais sur une épaisseur de 5 m et le calcaire d’Etampes.
Ce contexte de calcaire karstifié est sensible pour les fondations des ouvrages, puisqu’il peut être à l’origine de l’apparition de fontis profonds et de grands diamètres, générés par des processus de
rupture du toit calcaire ou par suffosion. Ainsi plus de 100 sondages quadrillent les 7 appuis du viaduc, pour une longueur totale de près de 4 km de forages.
En rive gauche, une cinquantaine de sondages géotechniques quadrillent les 4 futurs appuis de l’ouvrage de décharge. Ces différentes investigations complètent la campagne géotechnique de la phase G2 AVP réalisée par le BRGM en rive gauche, qui se caractérise notamment par les résultats d’une centaine d’essais au pénétromètre statique ainsi que le résultat des investigations hydrogéotechniques et géophysiques pointues (article du BRGM à découvrir en page 108).
ÉTUDES DE CONCEPTION DES FONDATIONS
Selon les résultats des travaux des investigations géotechniques et au vu de l’imprévisibilité de l’occurrence karstique à l’échelle de l’ouvrage, la solution de fondations sur pieux pour l’ensemble
des appuis a été retenue dans les études de conception et de prédimensionnement menées par Fondasol. Les appuis seront fondés sur des pieux de 1 400 mm de diamètre et ancrés dans les calcaires sains (de Pithiviers) au-delà de tout niveau karstique identifié dans les sondages.
Le premier défi à relever est d’accéder à chaque appui afin de réaliser les pieux, les semelles et les piles, tout en limitant entre autres l’impact sur l’écosystème.
Ainsi deux estacades de 250 m de longueur et d’une largeur de 7,80 m sont construites dans le lit mineur du fleuve depuis chaque rive, parallèlement au futur pont.
Ces estacades sont fondées sur 52 tubes de diamètre 813 mm, vibrofoncés et battus, ancrés dans le calcaire de Pithiviers. L’alignement et la régularité des espacements entre tubes est assuré par l’utilisation d’un guide tiroir. Au droit de chaque appui du futur pont, des antennes secondaires sont édifiées via la mise en fiche de 6 tubes de diamètre 914 mm. Des batardeaux de 7 x 11,5 m sont réalisés à l’aide de rideaux de palplanches AU18, soutenus par des liernes de type HEB550 et équilibré hydrauliquement par un bouchon immergé en béton d’une épaisseur de 2 m. Ils permettent de réaliser les phases de recépage des pieux.
RÉALISATION DES PIEUX
La vaste campagne d’essais géotechniques permet d’identifier les épaisseurs de calcaire de Pithiviers très karstifiées. Pour intégrer le risque d’effondrement par fontis sur l’épaisseur de cet horizon, des tubes métalliques de diamètre 1 420 mm et de longueur variables adaptées aux zones karstiques (13 m à 22 m) sont vibrofoncés puis battus à l’aide d’un marteau hydraulique d’énergie maximale 70 kNm.
Les pieux de fondations sont ensuite réalisés à l’abri de ce tubage définitif, par la technique du foré simple. D’une longueur de 20 m à 35 m, les pieux sont ancrés dans le calcaire de Pithiviers sain.
Le forage est effectué principalement par l’utilisation d’un bucket double à dent rocher, de diamètre 1 350 mm. Ponctuellement, une tarière double à dent rocher et un carottier peuvent être utilisés.
Ces outils sont montés sur une foreuse de forte puissance (Bauer BG40) développant un couple de rotation de 390 kNm. Lorsque la profondeur de forage est atteinte, la base du pieu est nettoyée à l’aide d’un bucket de curage, puis la cage d’armatures est mise en oeuvre avant de procéder au bétonnage du pieu à l’aide d’une colonne de bétonnage.
L’enrobage est assuré par des écarteurs positionnés entre la cage d’armatures et la chaussette à béton. Sur sa base, un joint torique est enroulé autour du géotextile et permet d’éviter le contournement du béton dans l’espace annulaire résiduel entre la chaussette à béton et le nu du forage. Avec la charge du béton lors du bétonnage du pieu, la gaine s’étend pour se coller au diamètre
du forage. L’élasticité du tissu étant limité, les vides résiduels ne sont alors pas comblés.
Afin de valider et d’industrialiser ce système de chaussettes à béton pour l’ensemble du projet, un essai de pieu préalable est réalisé, dans les mêmes conditions qu’un pieu de l’ouvrage. Sur la hauteur gainée, la surconsommation béton est inférieure à 12 %, avec une mise en oeuvre simple sur le chantier. Le système est alors adopté pour la suite du projet.
PHASAGE DES TRAVAUX
Le phasage général des travaux de pieux s’articule autour du lancement de la charpente métallique (sens nordsud), des contraintes écologiques et des contraintes géotechniques. La distance entre chaque appui est importante (plus de 80 m) et ne permet pas de réaliser les pieux simultanément sur deux appuis. Sur chaque appui de 6 pieux, les pieux sont réalisés successivement, sans recouvrement d’une phase forage d’un pieu et de bétonnage d’un autre pieu. En effet, les estacades secondaires
sont étroites et ne permettent pas la superposition des tâches. Il faut d’ailleurs déplacer des plateaux lourds pour chaque ligne de pieux (3 lignes). Surtout et malgré un espacement entre pieux supérieur à 3 diamètres, le risque de communication du béton par le biais d’un karst avec un pieu en cours de forage reste possible dans les couches de calcaire sain.
Stéphane Gilbert
Ingénieur travaux – Spie batignolles fondations
Manh Hai Le
Ingénieur études / géotechnicien – Spie batignolles fondations
GÉOTECHNIQUE FORAGE FONDATIONS FORAGE D'EAU ESSAIS
M² EXPOSITION INTÉRIEURE
6000
EXPOSANTS
190
M² EXPOSITION EXTÉRIEURE
1 500
PARTICIPANTS
3000