Géologue et géotechnicien de formation, Daniel Faisantieu a dédié sa vie à la connaissance.
Apprendre de ses disciplines de prédilection d’abord, et interroger les sols sans a priori pour réapprendre toujours à « penser l’impensable ». Un credo que ce laïc, longtemps attaché à la filière nucléaire, applique aujourd’hui dans son métier de consultant expert en sinistres auprès des assureurs spécialisées et des grands groupes de BTP.
À 71 ans, Daniel Faisantieu n’est pas près de mettre un terme à son métier de consultant. Depuis
28 ans, ce géologue de formation met ses connaissances en sinistralité due aux sols au service des assureurs et réassureurs. Un métier qu’il définit lui-même avec l’enthousiasme du premier jour :
« À la manière d’un avocat technique, l’expert en sinistres doit construire son dossier et décliner ses arguments de façon à les rendre les moins contestables possible. Une fois questionnées les différentes possibilités, il doit faire preuve d’habileté dans la construction de sa démonstration et se tenir prêt à affronter la contradiction ». Tenu à la confidentialité, l’homme ne peut démontrer tout le
sel de l’exercice en s’appuyant sur des exemples plus concrets.
Tout juste lève-t-il un peu le voile sur une autre de ses activités, indiquant être intervenu dans le cadre
de la « construction d’un grand magasin d’ameublement et d’une galerie commerciale » ou d’un
« grand projet d’extension en mer », en Méditerranée. Car le spécialiste est aussi, bien que plus occasionnellement, consulté en amont des projets par les maîtres d’ouvrage.
« Je fournis alors un avis préliminaire sur la gestion programmée des risques géotechniques. Risques
dont les enjeux sont toujours importants, comme on le comprend intuitivement dès lors qu’il s’agit
d’interface entre les sols et les constructions », résume le consultant qui ne laisse pas d’apprendre
des cas qui lui sont présentés.
Et c’est bien là qu’il puise sa motivation profonde : « J’ai appris durant mes études, bien entendu,
mais j’ai surtout appris toute ma vie. J’ai appris des gens, des événements, des chantiers, des
équipements. Tout est occasion d’apprendre », dit l’expert qui n’hésite pas à faire preuve d’une certaine ironie envers ceux qui croient avoir tout compris.
Une maladie « fréquente à la quarantaine ! », ironise-t-il.
L’ENFANCE DE L’ART
Mais pourquoi s’est-il consacré à l’étude des sols ? « Un vieux tropisme de jeunesse, sans doute »,
répond l’homme qui a passé son enfance au Pays basque, entre les falaises de Biarritz et de Bidart,
« de véritables livres de géologie à ciel ouvert ». Sans doute aussi par le souci de plaire à son père, pour qui « le mot d’ingénieur n’était pas un vain mot ». Peut-être enfin par le souhait d’un fils d’une famille modeste de dépasser sa condition ; quitte à réfréner son attirance pour le théâtre et la littérature qu’un merveilleux professeur de français avait su lui insuffler à l’adolescence.
Quoi qu’il en soit, bac en poche, Daniel Faisantieu s’initiera à la géologie et la géotechnique. Et
à 24 ans, celui qui revendique aujourd’hui en souriant un « bac + 50 » engage son apprentissage
professionnel chez Soletanche comme ingénieur d’études. De même chez Sol Essais qu’il intégra
ensuite. « J’étais flatté de rejoindre la société de Louis Parez, figure de la géotechnique et inventeur d’un pénétromètre statique à pointe hydraulique. » Son expérience chez Sol Essais durait encore en
1976 lorsqu’il saisit une occasion de participer à de grands projets industriels à l’export.
DANS LES BAGAGES DU CEA
« J’avais le goût de la découverte et l’envie de voyager ! C’était l’époque où Framatome et EDF exportaient leur savoir-faire un peu partout dans le monde. Employé d’un bureau d’études, filiale commune de Serete et du CEA, j’étais détaché pour participer à l’analyse de sûreté environnementale de sites nucléaires, au gré des projets internationaux clés en main », raconte-t-il, se souvenant de son départ quelque peu précipité de sa base iranienne lors de son dernier et bref séjour, peu après le retour de l’ayatollah Khomeini. « Sans récupérer toutes nos affaires, nous avions embarqué dans un avion-taxi pour rejoindre Koweit City et retrouver un avion de ligne pour Paris ». Mais ce n’est pas l’aventure telle qu’on l’imagine qu’il retiendra de ces 4 années d’expatriation partielle. Ce qu’il en a appris ? « La patience, d’abord. Dédouaner des matériels dans le port d’Abadan est un métier
en soi ! », s’esclaffe-t-il avant de reprendre plus sérieusement sur son appétit de dépaysement, comblé par cette période de sa carrière. L’épisode dura 4 ans. Mais surtout, grâce à de très confortables budgets d’études, il enrichit son bagage de la rencontre d’éminents experts. « Nous n’étions pas nombreux, mais les budgets étaient plutôt confortables. J’avais à peine 30 ans et je n’ai jamais connu depuis une telle situation d’abondance. Nous n’hésitions pas notamment à aller à l’autre bout de la planète pour rencontrer au débotté les meilleurs spécialistes en sismologie », confie-t-il.
Début 1980, l’encore jeune ingénieur rejoint l’Andra.
L’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs vient alors tout juste d’être créée. Il y intègre, en qualité de détaché, une première équipe de 7 personnes – dont il est le cadet – qui traitaient de la collecte, de l’entreposage et du stockage de déchets radioactifs. Son premier travail y fut d’analyser un rapport scandinave relatif au stockage géologique de déchets en site granitique.
LE TEMPS DE L’EXPERTISE
Un coup de coeur en forme de rencontre lui fait alors changer de cap et décidera du reste de son parcours professionnel. En effet, il croise le chemin de Jean Puyo, ancien chimiste venu de la direction des ressources humaines de la CFP, et fondateur du cabinet d’études CPA Experts, dans lequel Daniel Faisantieu ne tarde pas à s’investir. La formule de la coopérative, « proche de [ses] convictions philosophiques », le séduit, et l’exercice d’expert en sols près les assureurs l’enthousiasme dès la première mission. Un véritable engagement puisqu’il dirigea la coopérative 12 années durant en tant que président élu. Des 28 ans passés à étudier les sinistres, il met en avant l’extraordinaire occasion de parfaire ses connaissances : d’apprendre encore et toujours !
Mais sans oublier de transmettre pour que les efforts consentis servent à la collectivité professionnelle. Pour ce faire, il participe dès que l’occasion se présente à des formations à la gestion du risque géotechnique auprès des bureaux d’études spécialisés et des entreprises du BTP. « Il s’agit de partage et de prévention. En présentant les bévues les plus classiques dans les études et travaux géotechniques, j’espère contribuer à éviter qu’elles soient reproduites. Surtout, devant un auditoire qui a l’habitude d’intégrer les données remontées du terrain, je souligne l’intérêt du questionnement à propos de la représentativité de ces mêmes données. La géotechnique est une science s’exerçant dans un milieu naturel, et donc soumise à aléas ! »
De son expérience et de son savoir, Daniel Faisantieu en a aussi tiré un livre* ; un acte sans doute important pour celui qui reconnaît s’adonner aujourd’hui à l’écriture de romans. Gageons que le retour à son Pays basque natal, les plages de Bidart et leur arrière-plan montagneux lui procurent un cadre propice à l’inspiration. Quoi qu’il en soit, et tant qu’il le pourra, il continuera de délivrer son expertise en géotechnique sur les dossiers les plus délicats, en se limitant toutefois au sud de la Garonne : « À un certain âge, on a droit à des voyages plus intérieurs. »
Philippe Morelli
GÉOTECHNIQUE FORAGE FONDATIONS FORAGE D'EAU ESSAIS
M² EXPOSITION INTÉRIEURE
6000
EXPOSANTS
190
M² EXPOSITION EXTÉRIEURE
1 500
PARTICIPANTS
3000